"Autofiction: l’au-delà"
(...) Le mouvement de l’autofiction ramène à soi et risque de se terminer
dans le bégaiement. Mais ici, Christophe Cartier laisse sortir les images
fondatrices, et elles parlent. Au départ de cette exposition, il y a d’abord
un film. Par une succession d’images fixes et de fondus enchainés en noir
et blanc — images poignantes, parfois érotiques, parfois désespérées,
toujours en quête de leur inscription dans le monde —, ce film évoque
la période d’adolescence tardive où l’on se cherche, où les figures du
possible et de l’impossible se dressent de tous côtés. Et puis, vingt
ans après, nous savons que c’était notre jeunesse.Nous voici donc au-delà,
à l’endroit où nous pouvons situer le film dans la perspective de ses
images fondatrices, images que Christophe Cartier fait émerger en retravaillant
à l’encre certaines photos, et les nouveaux dessins blancs ou noirs qui
apparaissent se posent comme des traces de réminiscence ou d’oubli. Un
travail inédit alliant peinture, dessin et photographie, dans une scénographie
où “moi” s’échappe à lui-même.
Pierre Furlan, 2013
"Caché Caché"
(...) Christophe Cartier, certes, recopie et recolle. Mais comme de manière
de décopier et décoller. Décoller très couramment. Dans un sens terre
à terre, matière à matière, la métaphore étant sinon exclue, du moins
plaquée au sol. Décopier : le néologisme attire vers la déconstruction,
on préférera la décomposition, pour rester à ras de terre, au plus prés
des éléments les plus élémentaires. Décomposition comme processus plutôt
que procédé: dans la ligne du dérèglement des signes, le découpage du
vide et du plein.
Donc au lieu de cette dialectique habituelle du vide et du plein, et des
conceptions traditionnelles du dessin qui en découlent, Cartier semble
possédé par une synthétique (pas une synthèse impossible !) qui superpose
le vide et le plein, un plein qui troue et un vide qui comble. Il ajoute
le réfléchi au reflet, jumelle doublure et doublé, couple mire et miroir.
Comme dans la lettre volée d'Edgar Poe, où l'objet se dissimule dans son
apparence immédiate, c'est un art à la fois donnant-donnant et caché-caché."
Jacques NORIGEON, 2005